Beaucoup de personnes, pas obligatoirement à la pointe de la réflexion éthique, nous font cette remarque. Il est important de répondre à cette question, cela nous permet de discerner plus précisément les enjeux premiers, essentiels. La forme dit toujours quelque chose du fond.
Il est temps aujourd’hui de se poser cette question car la cour est loin d’être pleine. En effet, il nous a été offert pour l’instant que des mises en bouche, le « lourd » est à venir. Les débats éthiques vont devenir ainsi de plus en plus fondamentaux, âpres et émondants. Et ils ne souffriront en aucun cas de devenir des confrontations fondamentalistes étriquées qui ne grandiront pas notre liberté d’être.
1-Le hasard n’y est pour rien.
N’imaginons pas que l’agenda éthique actuel soit le fruit de la proposition 21 de l’un, de la volonté égalitariste homme – femme de l’autre ou de l’activisme de quelques détenteurs autoproclamés du monopole de la dignité. Sortons de notre exception française nombriliste ! Et prenons la peine de regarder au dessus de nos frontières, simplement en Europe, pour constater que ces débats occupent aussi nos voisins. Ainsi, d’aucun pense que cette concomitance des agendas européens a une signification. Ces débats éthiques s’inscrivent dans une histoire de la pensée humaine et non pas celle de tel ou tel terroir. Nous sommes loin des querelles de chapelles, bien gauloises !
2-Quel est le point central de ces différents débats éthiques?
Quels sont les points communs entre les cellules souches embryonnaires, les révisions des lois Léonetti (fin de vie) et Weil (avortement), la PMA, la GPA et le mariage pour tous, sans oublier l’ineffable « gender » ? La mobilisation importante à la quelle nous avons assistée en France souligne elle aussi la gravité du débat. Ces foules ne se sont pas mobilisées pour des revendications matérielles mais pour des idées, pour l’expression d’une conception de l’homme. Elles sont venues nous dire que c’est bien notre principe d’humanité qui est en jeu.
3-Sortir de la crispation?
Tous les acteurs concernés par ces questions ont apporté leurs arguments : pour, contre, ou encore oui mais… ou non mais…. Il nous faut maintenant, comme nous y invite Dietrich Bonhoeffer, distinguer les prétextes circonstanciels des raisons premières de fond. Ainsi, nous aurons plus de chance d’éviter cette crispation frontale du débat, faites d’invectives appuyées par quelques noms d’oiseaux. Pour éviter cet écueil, il nous faudra aussi tenir compte de la réflexion de Fabrice Hadjadj qui voit notre société raisonner avec une double erreur : le subjectivisme le plus sentimental et l’objectivisme le plus froid. L’enjeu est grave : la place de notre humanité. Je vous renvoie une fois encore vers Rémi Brague.
4-Et les Chrétiens dans tout ça ?
Notre foi nous donne une intelligence du monde. Ainsi, comme une injonction, il est de notre responsabilité de participer à ce débat de fond. Il nous faut entendre, comprendre ce que le monde dit. Il porte une part de vérité. Notre mission est d’interroger notre société acculturée par une « sainte ignorance » (Olivier Roy) sur ce qui fait l’essence de notre humanité, la source de notre dignité. C’est à ce niveau de réflexion que nous devons en tant que médecins chrétiens, du http://www.ccmf.fr/ ou non, interroger nos pratiques quitte à émonder notre foi. Elle ne s’en trouvera in fine que plus ajustée.
Dr Bertrand Galichon, Président du CCMF (Membre de la FIAMC)
http://hopital-urgence.blogs.la-croix.com/pourquoi-toute-cette-avalanche-ethique/2014/03/13/